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14 février 2012 2 14 /02 /février /2012 07:00

atar gull 01Atar Gull est le fils d'un roi africain de la tribu des Petits Namaquas. Mais depuis la nuit des temps, la tribu est en conflit avec celle des Grands Namaquas qui font régulièrement des razzias parmi les hommes du clan pour les revendre en tant qu'esclaves au commandant Benoit. Un jour, c'est au tour d'Atar Gull d'être fait prisonnier. Alors qu'il s'est juré de ne jamais pleurer, cet homme grand et fort adopte une attitude soumise et silencieuse devant le nouveau maître auquel il est vendu. Pourtant, se cache une terrible vengeance dans son coeur.

 

Nous sommes au XIXème et l'esclavage bat son plein en Afrique. Atar Gull est une "pièce" de choix et sa force, son impassibilité vont en faire un des favoris de Tom Will, homme à l'attitude paternaliste qui se prend d'affection pour lui. Devenant rapidement son plus serviable serviteur, Atar Gull est devenu indispensable à la bonne marche de la plantation jamaïquaine de ce dernier. Mais quand l'esclave découvre que ce "bon" maître est responsable de la mort de son père, il va tout sacrifier pour assouvir sa vengeance.

 

Adapté d'un roman d'Eugène Sue paru en 1831, Atar Gull est une terrible histoire romanesque qui nous plonge dans le sujet de l'esclavage. Loin d'être daté, le propos reste d'une grande force et d'une grande modernité. Car loin des récits d'esclaves qui tendent à regagner leur liberté après des années de servitude, Atar Gull présente un visage bien différent.

Son personnage surprend par la docilité dont il fait preuve. Esclave d'un maître qui traite ces derniers comme des êtres humains, notre fils de roi est plutôt bien loti. Si le début de sa nouvelle vie se passe plutôt bien (travail pas trop éprouvant, amour naissant avec une femme esclave, confiance du maître), Atar Gull va bientôt montrer un autre visage. Si personne, excepté sa femme, ne se rendra compte du feu qui couve, le lecteur va assister aux nombreuses petites actions de l'esclave qui vont bientôt le mener à des actes bien moins estimables...

Ainsi, l'ambivalence d'Atar Gull est bien troublante. Si on compatit face à l'horreur de cette vie asservie, on ne peut malgré tout totalement adhérer aux actes secrets de cet homme torturé qui a décidé de sacrifier son propre bonheur afin d'asservir à son tour son propre maître. La chute de cette vengeance est d'ailleurs particulièrement terrible et inattendue, et laisse un goût amer dans la bouche. Elle m'a presque laissée mal à l'aise ou même déçue devant ce gachis implacable.

De leur côté, les autres personnages ne sont pas totalement noirs et pas entièrement détestables. L'armateur qui transporte les esclaves est un homme simple qui tente juste de gagner un peu d'argent pour rejoindre sa femme et son fils. Tom Will, le planteur, veille au bien-être de ses esclaves. Finalement, le personnage le plus sombre de cette histoire est l'esclave lui-même avec cette envie de vengeance qui  lui dévorera le coeur.

 

Première découverte du dessin de Brunö, je dois dire que je me suis rapidement habitué à son trait épais. Les grands aplats de couleurs chaudes laissent une empreinte forte et contrastent avec le dessin anguleux faussement minimal. Tout cela donne une grande modernité à cette histoire datant pourtant de plusieurs siècles et beaucoup de charisme a un personnage qui n'en manque déjà pas.


Bref, loin d'être un récit attendu et manichéen, Atar Gull surprend par son héros à la volonté implacable, à contre-courant des "gentils" esclaves qui ne méritent que la liberté. Pourtant l'esclavage et les négriers sont bien évidement dénoncés. On notera particulièrement la description réaliste des transports en bateau et des conditions plus que difficiles de ces "sous-hommes" qui ne manqueront pas de faire frémir. Aussi, il est toujours bon de rappeler cette époque révolue (normalement.... quoi que...), de souligner ces actes choquants et de montrer que l'aliénation et la cruauté n'amène que le mal chez l'Homme.

Atar Gull est vraiment un album puissant scénaristiquement mais aussi graphiquement parlant.

A ne pas rater donc !

 

 

D'autres avis :

Yvan - Arsenul - Lunch - Jérome - Belzaran - Alfie's mec - David Fournol - PaKa -

 

 

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Titre : Atar Gull, ou le destin d'un esclave modèle

 Dessinateur : Brunö

Scénariste : Fabien Nury

Editeur : Dargaud

Parution : Octobre 2011

     88 pages 

Prix : 16,95€


 

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commentaires

J
<br /> Là aussi, je survole ton billet car cela va être ma prochaine lecture ... je l'ai emprunté il y a presque 3 semaines à la biblio lors de la rencontre spécial BD ! Je pense que je vais aimer !<br />
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C
<br /> <br /> Alors alors ?? T'en penses quoi ?<br /> <br /> <br /> <br />
M
<br /> A ne pas rater ? Ca tombe bien, il est acheté... y'a plus qu'à trouver le moment pour le lire ^^<br />
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C
<br /> <br /> Je crois que son heure est déjà venue... :)<br /> <br /> <br /> <br />
D
<br /> Ah, je suis resté complètement hermétique à cet album. Je n'ai pas du tout était emmené ni par les personnages ni par le récit. A la rigueur, le pirate que j'ai trouvé pas mal mais pour le<br /> reste... Rien !<br /> <br /> <br /> Je suis bien embeté mais je ne sais même pas pourquoi ?<br />
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C
<br /> <br /> Ah voui, à ce point ?? Contrairement à d'autres lecteurs, je ne dirais pas que cet album fut une claque mais de là à dire que je me suis ennuyée... Tu as essayé de le relire ?<br /> <br /> <br /> <br />
L
<br /> Je suis du même avis que toi en ce qui concerne la noirceur des personnages. Cependant, les auteurs considèrent, eux, que Tom Will, le planteur, est le plus grand salaud de l'histoire.<br /> <br /> <br /> Ceci dit, je ne peux leur donner tord. Évidemment, Atar Gull attire tous les regards par la puissance de ses actes et de sa vengence. Mais pour Fabien Nury (et Brüno partage son avis) : « Atar<br /> Gull et Brulat sont des maux isolés, alors que le planteur représente un mal répandu » (du moins à l'époque de la traite négrière).<br /> <br /> <br /> En tout cas, j'ai moi aussi été impressionné par la force du récit, par les sentiments amers qu'il laisse au fond des tripes. Il y a eu des bande dessinées plus abouties en 2011, mais celle là<br /> possède une force indéniable. C'est du moins mon point de vue.<br />
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C
<br /> <br /> Oui, c'est vrai. Tom Will fait le gentil" planteur mais en aucun cas, il ne cherche à remettre en question le système de l'esclavage. Tant que les esclaves sont sous ses ordres et qu'ils ne font<br /> pas de remous, il peut croire à un semblant d'humanité. Mais comparé à la force du personnage principal, il fait pâle figure ici. Les auteurs ont choisi de mettre sa vengeance en avant et non pas<br /> le mal représenté par les maitres.<br /> <br /> <br /> En tout cas, c'est sûr, ça laisse une certaine amertume de voir cet homme s'oublier totalement, tout sacrifier, pour une vengeance qui semble, au final, ne servir à rien.<br /> <br /> <br /> <br />
J
<br /> Un excellent album, une de mes plus belles lectures de l'année passée.<br />
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C
<br /> <br /> Je n'irais pas jusqu'à la mettre dans mon top mais un très bon album quand même !<br /> <br /> <br /> <br />

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