Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Vous trouverez ici mes lectures, mes coups de coeur de libraire et plein d'autres joyeusetés !

Groenland Manhattan - Chloé Cruchaudet

Groenland-Manhattan-01.jpgIl y a un mois, je vous parlais d'une bande dessinée sur l'histoire de Minik, le jeune inuit qui a été emmené avec d'autres membres de sa communauté en plein New York, par le commandant Peary. Ma lecture du Minik d'Hippolyte et de Marazano a donc été suivie de peu par l'album ici présent de Cruchaudet.

 

Nous sommes au Groenland en 1897. Le commandant Peary et ses hommes sont sur le départ pour retourner en Amérique. Les cales sont chargés de "souvenirs" à ramener de son expédition comme une énorme météorite qui devrait impressioner le muséum. Les questions du petit Minik au commandant vont entraîner un peu par hasard son départ avec sa famille pour ce pays qui lui semble si étrange qu'il ne croit pas à son existence. L'arrivée en Amérique et le quotidien qui les attend va être rude... Vous le savez déjà : sur les 5 inuits arrivés, seul le petit Minik survivra à la maladie contre lesquels ils n'étaient pas imunisés. Et c'est seul que Minik devra affronter cette nouvelle existence.

 

Difficile de ne pas inscrire cette lecture dans un procédé de comparaison avec l'autre album.

Ici Chloé Cruchaudet débute son récit au Groenland. On y découvre l'attitude un peu détestable de Peary qui semble ne chercher qu'un quelconque profit et remercie les locaux à coup de boites de conserves et d'aiguille à coudre alors qu'il se lance dans de grandes diatribes poétiques dans son journal personnel ! Mais c'est surtout l'occasion pour l'auteur de nous faire partager la vie quotidienne des inuits en pénétrant l'intimité de quelques uns. On y découvre leur générosité, leur timidité et leur maladresse face aux objets occidentaux. Y sera évoqué également les avis partagés qu'ils ont sur le commandant Peary, sorte de fou un peu têtu. L'arrivée à New York se révèlera assez traumatisante pour eux, assaillis par des milliers de curieux qui viennent les voir comme des animaux exotiques. Alors qu'ils se meurent peu à peu, Peary se préoccupe bien plus de l'argent que cette expédition peut lui revenir à coup de représentations, objets-souvenirs, etc... qui lui permettrait de repartir. On voit le jeune inuit grandir et s'intégrer comme il peut, jusqu'au jour où une découverte choquante réveille  violence et désir de vengeance contre ce Peary qui ne tient pas ses promesses.

 

Bien évidement, Peary comme d'autres américains sont ici montrés du doigt pour leur égoisme et leur racisme intrinsèque. Pour eux, les "esquimaux" sont juste des bêtes curieuses qui rapporteront quelque avantage financier ou dépayseront pour un temps les badauds locaux. Leurs sentiments sont totalement niés et la découverte fracassante du petit Minik le prouve bien.

Pas grand chose à dire que je n'ai déjà dit pour l'album Minik. On retrouve la même trame et les mêmes dénonciations.

Néanmoins, Chloé Cruchaudet choisit ici de débuter et de terminer son récit au Groenland. Elle évoque ainsi le retour de Minik sur sa terre natale et surtout l'impossibilité du garçon de se réadapter à son ancienne vie et à s'intégrer dans un nouveau groupe qui a tout oublié de lui et de sa famille. Voilà une perspective fort intéressante qui était absente de Minik et donne un nouvel éclairage à la destinée du jeune homme, plus tout à fait esquimau, ni tout à fait américain.

Néanmoins, du fait qu'il fasse suite à ma lecture de Minik, je ne lui ai pas trouvé la force et l'impact que le premier album m'avait offert. La découverte de Minik qui va entraîner sa rébellion m'a, par exemple, semblé moins "choquante", moins forte : certainement que je m'y attendais déjà.

 

Côté dessin, rien à redire ! Le trait de Cruchaudet que je découvre est de grande qualité. Les tons sont majoritairement éteints et soulignent le froid de la banquise comme celui de New York. Elle intercale dans son récit des pages plus oniriques dans un style graphique différent plus coloré de genre naïf, comme des articles de journaux évoquant Peary ou Minik.

Dans sa narration, elle réussit avec brio à relever les différences et les incompréhensions entre les 2 peuples. On trouvera par ailleurs une postface documentaire accompagnée de photos anciennes et d'une bibliographie.

 

En conclusion, j'ai pris du plaisir à lire cet album qui tient d'une certaine façon au récit ethnographique en s'interrogent sur l'éthique de l'exploration et sur les difficultés d'intégration de différentes cultures, mais j'ai pour ma part une petite préférence pour le Minik qui, par ma découverte personnelle du sujet, par le parti-pris plus dramatique et poétique m'a emporté avec plus de force sur les pas du jeune inuit.

 

Un album à découvrir dans tous les cas !

(malgré ce laborieux billet dont je ne suis pas du tout satisfaite...j'ai vraiment trop trainé pour la rédaction...)

 

D'autres avis :

Théoma - Keisha - Joelle

 

Liens :

Les premières pages sont à lire ici !

 

Groenland-Manhattan-02.jpg

 

 

Groenland-Manhattan-03.jpg

 

Groenland-Manhattan-04.jpg

 


Titre : Groenland Manhattan
Scénario et Dessin : Chloé Cruchaudet
Editeur : Delcourt, Mirages
Parution : Mars 2008

128 pages

Prix : 16,50 €


 

palseches

Women bd

bd du mercredi

 

 

 

 

 

 

 

 

Challenge roaarrr

 

 

 

Prix Goscinny 2008


Retour à l'accueil
Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article
J
<br /> <br /> Il m'avait beaucoup plu, cet album, aussi bien côté histoire que côté dessins ! Je voulais lire Minik pour comparer mais il n'est pas à la biblio ... je vais devoir leur faire (encore !) une<br /> suggestion d'achat (mais je vais attendre la rencontre du club lecture BD en octobre !)<br /> <br /> <br /> <br />
Répondre
C
<br /> <br /> Bah, j'ai pas trouvé ton avis !?<br /> <br /> <br /> ...bon, ayé, je viens de le trouver :)<br /> <br /> <br /> Oui ça serait bien que tu arrives à le chopper !<br /> <br /> <br /> <br />
M
<br /> <br /> Très tentée par cet album d'ailleurs, le travail que Chloé Cruchaudet a réalisé sur "Ida" m'a vraiment plu.<br /> <br /> <br /> Je me sens plus prete à découvrir Minik par le biais de cet album que par celui de Marazano et ton avis ne fait que conforter ce ressenti<br /> <br /> <br /> <br />
Répondre
C
<br /> <br /> Aaaaah ! Voilà une nouvelle qu'elle est bonne ! :) Même si je sais que c'est surtout grace à la dessinatrice ^^ Ptet que tu auras envie de lire Minil après <br /> <br /> <br /> <br />
T
<br /> <br /> l'autre est à lire si je comprends bien ! Mais tout de même, quel graphisme ! Chloé Cruchaudet est une grande artiste.<br /> <br /> <br /> <br />
Répondre
C
<br /> <br /> Oui tout à fait ! Je serais curieuse d'ailleurs d'avoir ton avis comparatif !<br /> <br /> <br /> <br />
K
<br /> <br /> Hé oui, la belle époque où je chroniquais mes BD...<br /> <br /> <br /> <br />
Répondre
C
<br /> <br /> Ouais, quel dommage... <br /> <br /> <br /> <br />
P
<br /> <br /> Je crois que je commencerai par celui-ci, qui me semble plus complet. Dailleurs, si je comprends bien, c'est surtout le fait que tu connaissais déjà les moments clés du récit qui t'a fait moins<br /> aimé celui-ci?! Donc en commençant par lui, ne connaissant pas tous les revirements, je le préférerai, j'imagine?<br /> <br /> <br /> Un mot, en passant : si, à l'époque et pendant longtemps, le terme eskimo (ou esquimaux) était de mise, il y a belle lurette que ces gens ont demandé à se faire appelé par leur vraie appellation,<br /> soit le mot Inuits. Le terme eskimo, qui veut dire «mangeurs de viande crue» fait très réducteur, et représente bien l'idée exotique et fracassante que les colonialistes de l'époque<br /> voulaient qu'on se fasse de ce peuple. Le terme Inuits, qui signifie justement «le Peuple» dans leur langue, est maintenant largement répandu, du moins de notre côté de l'Atlantique. Je<br /> discutais avec des Français en voyage ici, au Québec, pas plus tard qu'il y a deux semaines, et j'ai cru comprendre avec étonnement que cette nuance n'avait pas encore traversé l'océan! Il le<br /> faudrait bien, pourtant: vous ne voulez certainement pas perpétrer cet esprit de colonialisme décrié dans ces albums, si??<br /> <br /> <br /> <br />
Répondre
C
<br /> <br /> UN grand merci PG pour ta précision sur les inuits ! Le pire, c'est que je connaissais la distinction mais que j'ai bêtement repris le terme de l'album, utilisé pour des raisons bien précises<br /> d'ailleurs. Je suis allée vérifier sur mes billets de Minik et Monroe : j'ai bien utilisé le terme inuit. Quand je disais que ce billet n'étais pas bon ! Je vais changer mes mots pour le coup :)<br /> <br /> <br /> POur en revenir à l'album, oui, j'interprète le fait d'avoir déjà découvert un album similaire dans le fait de ne pas avoir apprécier autant celui-ci. Car je ne me l'explique pas bien autrement.<br /> Le traitement est fort différent entre les 2. C'est peut-être plus mis en scène dans Minik alors qu'effectivement Groenland Manhattan couvre une période plus longue. Je dois dire que j'ai dû mal<br /> à les comparer objectivement finalement !<br /> <br /> <br /> <br />