Nous sommes en 1898. L'explorateur Peary est en pleine expédition dans l'antarctique. Les conditions sont difficiles et l'équipage se bat contre les éléments. Mais le commandant est heureux car ce qu'il ramène de son voyage va lui apporter la célébrité et surtout le financement pour repartir à nouveau.
Son précieux chargement n'est autre qu'un groupe d'inuits. Confiés au museum d'histoire naturelle de New York, ces hommes considérés comme des sauvages par la population vont devenir l'attraction du moment. Malheureusement, les inuits vont rapidement tomber malade, touchés mortellement par la grippe. Seul le jeune Minik, désormais orphelin, en réchappera. Désormais sous la garde de Mr Wallace, père d'un fils du même âge et autrement plus réceptif à l'humanité de ce jeune garçon, Minik grandit paisiblement et découvre sa nouvelle culture. Jusqu'au jour où une découverte bouleversante le pousse à fuir et à rerouver ses racines inuit pour mieux se venger...
L'histoire de Minik, vous le savez certainement, est un pan de notre histoire. Basé sur des faits réels, l'album reprend le destin tragique de ce jeune garçon, amené un peu malgré lui en Amérique. En échange de leur venue, Peary avait promis de fournir nourriture et équipement à leurs familles mais le poids de quelques inuits, rapidement décédés ne vaut pas grand chose face à l'excitation des découvertes et l'obession de repartir.
Ici, l'attitude de Peary est bien évidement dénoncé, tout autant que le "racisme" de l'époque qui considérait ces peuples inconnus de sauvages qui ne valent même pas la nourriture qu'on leur donne. On les tourne en ridicule, on leur jette des cacahuètes et on leur fait même visiter un zoo, à eux, chasseurs habitués à une faune libre. La bonté des autres cache un certain colonialisme et paternalisme.
Le contraste est édifiant mais le petit Minik réussit tant bien que mal à s'adapter, non sans soupirer après sa vie d'autrefois. On découvre d'ailleurs par flash-back quelques scènes traditionnelles inuites au gré des souvenirs de Minik et de l'enterrement de son père qu'il célèbre selon ses rites. On partage le choc du jeune garçon quand... je vous laisse la surprise :) et on ne peut que comprendre la violence qui en découle.
Au niveau du dessin, nous avons Hippolyte aux commandes qui nous offre de superbes aquarelles. Les bords de cases ne sont pas strictement délimités et cela accentue l'effet peinture. Les tons sont fort bien choisis : du bleu pour les scènes neigeuses, des couleurs plus chaudes pour les séquences intérieures ou citadines.
Minik est un formidable album qui parle d'un peuple méconnu et un peu oublié qu'on a voulu exhiber comme des trophées. Il est aussi le récit initiatique d'un jeune garçon qui découvre la dureté et l'hypocrisie du monde par ses yeux d'enfant. Véritable plaidoyer pour la tolérance et la richesse de la diversité des peuples, il revient de manière salutaire sur un épisode peu glorieux de l'histoire mondiale des explorations.
Un album très poignant à découvrir !
A noter :
Un autre album sur le même sujet, Groenland Manhattan, a précédé de peu Minik qui, dans les critiques, a parfois souffert de la comparaison.
Ne l'ayant pas (encore) lu, ma lecture en est totalement libérée.
Mais le hasard faisant parfois bien les choses, cet album s'est retrouvé depuis peu dans mes mains :) : critique à venir donc !
D'autres avis :
Mr Zombi -
Minik
Scénariste : Marazano
Dessinateur : Hippolyte
Editions Dupuis, Aire libre
Septembre 2008 - 64 pages - 14,95€
Chez Mango
Challenge PAL sèches chez Mo'