Alain Mangeon est médecin. Mais aujourd'hui, c'est devant un jury qu'il se présente. Que s'est-il donc passé ?
Dans le cadre de ses consultations, Alain a fait la connaissance d'Isabelle qui lui fait part de ses angoisses et de ses coups de déprime. Son mari Paul est militaire et est souvent absent lors de ses missions dans le golfe. Peu à peu, au fil de ses visites, Isabelle se confie de plus en plus à Alain et lui parle de violence conjuguale dont elle est victime. Alain devient rapidement son amant et tente de soutenir la jeune femme dont il est très amoureux. Hélas, parfois l'amour rend aveugle...
Impossible d'en dire plus sur cet album qui mènera en bateau le lecteur et certain de ses personnages sans révéler le fin mot de l'histoire.
S'inspirant d'une histoire vraie, Fred Pontarolo a construit une intrigue qui couvre les 8 années que le couple interdit vivra ensemble.
Isabelle semble psychologiquement cassée, souffrant en silence des horreurs que lui inflige son mari. Alain, lui, est terriblement touché par sa détresse et délaisse peu à peu sa propre famille. Pourtant, on sent comme un certain malaise. En tant que médecin, Alain semble avoir une position assez statique devant ces violences. Malgré le secret professionnel, on s'attendrait à ce que son implication soit plus forte, qu'il tente de convaincre Isabelle de fuir son mari, de réagir. Son soutien restera moral et les années passant, les faits s'aggravent.
Contre toute attente, il sera question dans Le serpent d'Hippocrate, de manipulation et de maladie mentale. Ce n'est que dans les toutes pages que le voile se lèvera sur une suprenante révélation. Chapitré en plusieurs parties, l'histoire trace les grandes lignes de la relation entretenue entre Alain et Isabelle. Malgré les grosses ellipses temporelles, le ton de leur relation est clairement palpable. Alain est très amoureux. Isabelle, soumise et impuissante devant son mari. On ne peut que se révolter devant la description des sévices racontés par Isabelle. Mais les choses sont bien plus complexes et les apparences parfois trompeuses.
L'auteur réussit avec succès à décortiquer tout la psychologie des personnages et de la relation qui les tient. Fait de petits détails anodins, cette histoire garde en son sein une révélation percutante qui associera notre surprise à celle de l'un des personnages. La tension s'accentue crescendo et le drame est attendu.
Après le coup de théâtre final, on pourra néanmoins regretter l'absence de quelques pages supplémentaires permettant d'affiner un peu plus les raisons de tout ceci.
Visuellement, c'est un très beau dessin qui nous est offert ici. Le trait est fin, les visages anguleux et les couleurs, particulièrement réussies, restent dans des teintes douces ou passées tout en plongeant parfois dans des épisodes plus sombres, plus tourmentés. On notera aussi la présence de dessins enfantins réalisés par Dorothée Jost. Pour certaines planches, Pontarolo utilise même de très beau lavis qui donne beaucoup de profondeur.
Un album réussi donc qui ne pourra qu'impressionner par le retournement et la manipulation dont l'auteur fait habilement preuve à l'égard de ses lecteurs... et de ses personnages !
D'autres avis :
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Titre : Le serpent d'Hippocrate
Auteur : Fred Pontarolo
Editeur : Futuropolis
Parution : Mars 2011
56 pages
Prix : 15€