Le coupeur de roseaux est un court roman, écrit en 1932.
Nous suivons le narrateur qui décide de se promener aux abords du sanctuaire de Minase, ancien palais de l'empereur Gotoba (12ème siècle) transformé en lieu de culte. Son récit est émaillé de descriptions géographiques et historiques et ponctués de citations littéraires et poétiques. Il imagine l'empereur et le décor qui s'offrait à ses yeux tout en plongeant dans ses écrits.
"Je regarde dans le lointain
Le pieds des montagnes est enveloppé de brume
Rivière Minase !
Pourquoi avoir préféré
Les soirs d'automne ? "
Sa promenade le conduit au fleuve Yodo qui se traverse en 2 fois pour atteindre Hashimoto. Un banc de sable au milieu du fleuve sert de relai. C'est sur ce banc de sable que notre narrateur décide de se poser pour contempler à loisir la pleine lune.
La lune au dessus du fleuve Yodo et du château d'Osaka, par Hokusaï
C'est sur cet îlot qu'il rencontre un coupeur de roseaux qui, tout en lui offrant du saké sans compter, lui rapporte une anecdocte de jeunesse : son père l'emmenait chaque année en promenade sur les bords de la rivière Yodo et s'arrêtait pour observer une belle jeune femme qui jouait du Koto sur la berge opposée. Les années passent et le père se décide enfin à raconter à son fils l'histoire de cette femme.
On va découvrir alors, en même temps que notre narrateur, une histoire d'amour contrarié entre la belle O-Yû et le père, où le respect, l'amour pur et le sacrifice sont élevés au rang d'honneur.
Je n'en dirais pas plus pour ne pas vous dévoiler la richesse de l'intrigue.
Ce roman très intéressant n'est toutefois pas si facile d'accès suite à la longue introduction du narrateur sur le lieu de sa promenade. Regorgeant de références peu connues par les lecteurs occidentaux, il peut très rapidement ennuyer... Cependant, il faut avoir le courage de poursuivre pour atteindre la partie du récit sur O-Yu et Shinnosuke, autrement plus passionnante.
Entremêlant passion, secret, raffinement, mélancolie et relation à trois, cette histoire en forme de conte traite du désir innasouvi et l'élève comme forme d'amour suprême. Une femme sacrifie sa vie pour l'amour de sa soeur et de son mari. Une autre se refuse à aller contre les traditions. Un homme se marie par amour d'une autre femme. C'est une relation triangulaire bien complexe qui nous est présentée ici.
Le problème de la condition féminine est quelque peu montrée du doigt. Enfermées dans les traditions, elles sont soumises au bon vouloir de leurs maris et de leur famille.
Le lecteur baigne dans une atmosphère de mystère et de mélancolie renforcée par une écriture poétique qui rappelle les haikus.
Bref une belle découverte malgré une mise en place un peu longue du récit.
Il est à noter que le cinéaste Mizoguchi s'est inspiré de cette nouvelle pour réaliser en 1951 le film "Mademoiselle Oyu".
Tanizaki s'étant lui-même inspiré du conte floklorique japonais : le coupeur de bambou. Datant du Xème siècle, il est considéré comme le plus ancien texte narratif japonais.Je vous renvoie à la notice Wikipédia qui est très bien faite : http://fr.wikipedia.org/wiki/Kaguya-hime.
Cette lecture était commune avec Cynthia qui a trouvé l'histoire très agaçante !
Note : ****
Editions Folio, 2€